Alexis de TocquevilleLa religiosité n’est pas nécessaire à l’action morale. On sait au moins depuis Diderot qu’il est parfaitement possible d’agir moralement tout en étant athée. Même, alors qu’on pourra toujours soupçonner un croyant d’agir moralement uniquement par peur de Dieu ou désir d’une récompense dans la vie prochaine, on ne pourra jamais faire ce reproche à un athée, de sorte qu’à première vue, le motif qui pousse l’athée à agir moralement est plus pur que celui du croyant.

Le religiosité n’est pas non plus suffisante à l’action morale. Il n’y a qu’à voir les extrémismes, fondamentalismes, intégrismes de toute sorte sévissant autour de nous. Comme l’écrivait Alain, cela justifie d’être athée par précaution car Dieu est trop souvent dans le camp des tyrans.

Si la religion n’est ni nécessaire, ni suffisante à l’action morale, doit-on en déduire qu’elle lui est opposée ? Que non. Qui oserait nier que Jésus et autre pèlerins du Mayflower n’aient pas agi, au moins, conformément à la morale ? L’histoire des États-Unis enseigne que celle-ci peut être un formidable accélérateur de moralité, mais également de son contraire. Ne s’appuyait-on pas sur la Bible tant pour justifier que pour abolir l’esclavage ?

Cela justifie les théories utilitaires de la religion ne lui donnant pour seule légitimité que d’être un outil de gouvernance sociale. Comme l’écrivait Tocqueville : « Une société civilisée, mais surtout une société libre, ne peut subsister sans religion. Le respect de la religion y est […] la plus grande garantie de la stabilité de l’État et de la sûreté des particuliers. Les moins versés dans la science du gouvernement savent cela. »

La religion prescrit. Si les prescriptions religieuses sont conformes à la morale, la religion sera un puissant prescripteur de morale.

Voilà pourquoi l’athée doit se montrer mesuré. Sans doute agir sans crainte de Dieu et sans espérance post mortem est-il le plus haut critère de moralité et de liberté puisque le mouvement de l’action n’est plus initié par une quelconque transcendance mais par le sujet lui-même en toute autonomie. Reste qu’en l’absence de frein ou d’accélérateur religieux, l’action humaine ne pourra être contrainte avec autant de force qu’avec l’outil de la superstition et du noble mensonge.

La liberté de l’homme présuppose qu’il se débarrasse des chaîne imaginaires de la religion. Mais avant de se débarrasser de Dieu, la société doit d’abord conquérir sa moralité. La religion est comme le tuteur qui lui permet de grandir en s’appuyant sur lui. Une fois adulte, il convient de s’en débarrasser. Mais sans tuteur, pas de développement possible.

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