Salvador DaliTout d’abord, rappelons que beaucoup de philosophes et de théologiens ont cru pouvoir démontrer l’existence de Dieu. Le principe des preuves utilisées est simple, et Kant les a classées en 3 types : 1) physico-téléologique 2) cosmologique 3) ontologique

J’ai classé ces 3 preuves (ou plutôt arguments pour parler comme Kant) selon l’ordre où elles apparaissent ordinairement à l’esprit. Tentons de les expliquer.

L’argument physico-téléologique consiste à déduire l’existence de Dieu à partir des différentes finalités que l’on peut découvrir dans la nature. Qui ne s’est jamais étonné de la finalité, du sens de la nature ? Tout cela a un sens, la nature ne peut pas être un donné gratuit, venir du simple hasard comme le voudraient les épicuriens et autres matérialistes par exemple. De plus, comment est-il possible que l’on puisse découvrir des lois mathématiques pour décrire les différents phénomènes de la nature? De tout cela, on peut en induire que le monde soit modelé par une intelligence supérieure.

L’argument cosmologique par d’un autre principe et apparaît ordinairement avec la réflexion, quand le sujet prend conscience de sa propre existence. Cet argument dit : j’existe, mais pour que j’existe, il fallait nécessairement qu’il y ait de l’être, car rien ne peut venir du non-être. De là, on en déduit un premier être nécessaire, sans lequel rien ne pourrait exister. Dieu est ici prouvé car vu comme une cause première.

L’argument ontologique consiste à déduire l’existence de Dieu à partir de sa simple essence, nature ou définition. Il ne procède pas, contrairement aux deux précédents, a posteriori, c’est-à-dire à partir d’une expérience empirique. On le retrouve tout d’abord chez St Anselme, puis réintroduit sous une autre forme chez Descartes. Leibniz et Hegel l’utiliserons aussi par la suite. St Anselme disait : 1) Dieu est ce qui est le plus grand que l’on puisse concevoir 2) J’ai son idée dans mon entendement (je comprends son nom, preuve que cette idée est dans mon entendement) 3) Dieu étant ce qu’il y a de plus grand, il est plus grand d’exister dans l’entendement et dans la réalité que dans l’entendement seulement 4) Par cela, on en déduit que Dieu existe. Chez Descartes, c’est un peu différent : 1) Dieu est l’être souverainement parfait 2) Il est plus parfait d’exister que de ne pas exister (en d’autres termes, l’existence est une perfection) 3) Un Dieu inexistant est donc inconcevable, puisqu’il lui manquerait une perfection, ce qui le rendrait imparfait donc étranger à sa nature. Donc Dieu existe.

Ces trois types de preuves ont longtemps été discutées. Certains en admettaient certaines et en excluaient d’autres, comme par exemple St Thomas d’Acquin qui admettait les 2 premières mais pas la 3ème. Au final, il fallut attendre Kant et sa Critique de la raison pure pour que la question soit vraiment débattue et tranchée.

Ce que dit Kant, pour l’argument ontologique, c’est que l’être, l’existence, ne peut pas être considéré comme un prédicat réel. L’être n’est pas une détermination supplémentaire d’un concept, mais ce qui fait que ce concept passe du possible logique au possible réel (ce que dira déjà Gassendi à Descartes au XVIIème siècle dans sa 5ème objections aux Méditations métaphysiques). En fin de compte, cet argument n’est qu’un sophisme. Pour les deux autres arguments (physico-téléologique et cosmologique), Kant dit qu’ils reposent en quelques sortes sur l’argument ontologique. Ils veulent faire passer du logique au réel. Mais Kant montre que c’est impossible.

Ainsi, tout ce qu’a voulu montrer Kant, c’est que Dieu ne peut pas être un objet de connaissance. On ne peut prouver son existence. On peut trouver des arguments qui iraient dans son sens, mais rien n’est totalement probant. Dieu n’est pas un objet de connaissance, mais il est en revanche un objet de croyance. D’où la célèbre citation de Kant : « j’ai du abaisser le savoir pour faire place à la croyance ». On ne peut que croire (ou ne pas croire) en Dieu.

En revanche, Kant admet, pour la raison pratique, c’est-à-dire dans le domaine de la morale, que l’on puisse postuler l’existence de Dieu. Pour lui en effet, il est impossible de bâtir une morale si l’on suppose Dieu absent (on se souvient à cet égard de Doisteievski : « Si Dieu n’existe pas, tout est permis »).

Mais dans tous les cas, la seule voie d’accès au divin reste la croyance. On en revient donc à Pascal. Dieu est accessible par le coeur, non par la raison. Ainsi, chercher à le comprendre, ce serait user de sa raison et ainsi dénaturer ce qu’est Dieu. Ce sont d’ailleurs les reproches qu’adressait Pascal à Descartes quand il voulait prouver son existence comme nous l’avons écrit ci-dessus.

Certains penseurs postkantiens ont tenté de trouver une solution à la nouvelle problématique posée par Kant. Une des grandes innovations kantienne est la distinction entre le phénomène et le noumène. Les phénomènes sont ce qui apparaît à la conscience du sujet connaissant. Seuls eux sont connaissables. Les noumènes désignent l’être-en-soi, c’est-à-dire ce qui est responsable du phénomène. Pour Kant, il est impossible de le connaître. L’homme doit se contenter pour sa connaissance des phénomènes et abandonner la quête du noumène. Dieu fait partie de ce qui est inconnaissable.

Toutefois, malgré cette donne kantienne, beaucoup ont voulu quand même connaitre l’inconnaissable. Inutile d’énumérer tous ces penseurs : ils constituent l’essentiel de l’histoire de la philosophie après Kant. De Hegel, Schopenhauer, Schiller, Schelling mais aussi Bergson, Jaspers, etc. tous ce sont disputés à ce sujet, de savoir si une métaphysique est encore possible.

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